ENVIRONNEMENT

Publié le 06 avril 2021

«Les gens qui préfèrent leur enfant à leur argent passent pour des radicalisés» Ce physicien dénonce !

Le physicien Aurélien Barrau était l'invité du forum «Global Positive Forum 2019» qui s'est tenu le 3 décembre 2019.

«Si les 10% vertueux sont les 10% les plus riches, ça changera tout»

Aurélien Barrau: «Je crois qu'il faut absolument, c'est le plus urgent au niveau de l'action concrète, comme vous le voulez, que nous sortions de l'état d'hébétude, pour ne pas dire d'aliénation qui est actuellement le nôtre. Si vous voulez, le verrouillage systémique a fait en sorte qu'aujourd'hui, les gens qui préfèrent leur enfant à leur argent passent pour des radicalisés. Les gens qui préfèrent sauver la vie plutôt qu'un point de croissance passent pour des doux dingues. Alors je pense que la plupart des gens présents dans cette salle fréquentent beaucoup d'économistes et se disent oui, mais il y a des réalités économiques. Si vous voulez. Mais moi, je suis physicien et je peux vous assurer que les réalités économiques, elles, sont contractuelles. Les réalités biologiques, c'est-à-dire les gens qui meurent. Les réalités physiques, c'est-à-dire le crash du système planétaire qui est actuellement en train d'avoir lieu, ça, ce sont des réalités non contractuelles. Elles se rappellent à nous et il va être temps d'être un peu sérieux. Si les 10% vertueux sont les 10% les plus riches, ça changera tout. Donc, tout dépend effectivement à qui on s'adresse. Parce qu'actuellement, évidemment, c'est un petit nombre qui est quand même à l'origine de l'essentiel du désastre. La pollution tue 800.000 personnes par an en Europe. Vous vous rendez compte ? Si le terrorisme faisait le dixième, le centième, le millième de ça, on serait aujourd'hui non pas en train de tenir ce forum. Ce forum serait interdit. On serait en état de guerre, alors nous sommes en état de guerre, mais nous ne nous rendons pas compte. La croissance, ça ne m'intéresse pas du tout. Ce qui est intéressant, c'est le progrès, c'est le bien vivre, c'est l'amour, c'est la créativité, la décroissance, je l'appelle de mes vœux. Elle ne doit pas faire peur. Le PIB, on s'en fiche complètement. C'est pas ça qui est important dans nos vies. Je m'inscris parfaitement en faux par rapport à ce dogme qui relève de la pensée magique, qui voudrait que la croissance soit quelque chose d'indépassable, de fondamentalement bon pour nos vies. Aujourd'hui, la corrélation entre la croissance du PIB et la dévastation écologique est un fait scientifique acté. Donc, il va falloir qu'on revoie nos logiciels. Je m'inscris un peu en faux par rapport à mon voisin qui me disait : " Moi, bon, je suis un peu plus âgé que vous et donc j'entends tout cela depuis 40 ans."»

«En 40 ans, les populations d'animaux sauvages ont disparu de 60%»

Christophe Barbier: «La sagesse, la sagesse.» Aurélien Barrau: «Mais précisément. Précisément, en 40 ans, les populations d'animaux sauvages ont disparu de 60%. C'est une catastrophe. Ce n'est pas une peur de l'avenir. C'est un bilan du passé. Et quand vous dites qu'il faut être précis, c'est-à-dire effectivement, ne pas tout mélanger parce que ce sont des questions complexes. Je suis on ne peut plus d'accord, mais je ne comprends même pas pourquoi vous la rabattez sur le problème du carbone. Ce que je viens d'évoquer tout à l'heure n'a strictement rien à voir avec le réchauffement climatique. Ce n'est pas le réchauffement climatique qui, à ce stade, est responsable de l'extinction de la vie sur Terre. Pas du tout. Ce sont les pesticides, c'est la surpêche et la disparition des espaces de vie. Donc, manifestement, nous n'avons, dans cette salle de personnes concernées, pas encore même compris quel était l'enjeu du problème.» Christophe Barbier: «En tout cas, on n'arrive pas à relier entre les différents enjeux.» Aurélien Barrau: «Mais c'est notre manière d'habiter l'espace, l'enjeu. Si vous voulez, le point maintenant, ce n'est pas de faire une source d'énergie propre parce qu'avec un bulldozer qui fonctionne à l'énergie solaire, on peut raser la forêt amazonienne, on n'aura pas émis de CO2 mais on va quand même raser la forêt. Ce qu'il faut maintenant, c'est comprendre que la vie vaut pour elle-même, c'est de cesser d'instrumentaliser et de financiariser des valeurs qui sont fondamentalement hétérogènes à ces atrophies, ou en quelque sorte, à ces réductions. Ce qui est extraordinaire, quand même, c'est que dans le passé, on aurait dû le faire pour éviter le colonialisme, pour éviter des affronts sociaux absolument extraordinaires. On n'a pas su le faire parce que les dominants, entre guillemets, les puissants, n'avaient aucun intérêt à le faire. Mais aujourd'hui, même ceux qui ont les rênes ont intérêt à le faire parce que cette activité de surprédation devient suicidaire. Donc, si même cette fois nous échouons, cela relève quand même littéralement d'une sorte de folie humaine.»



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