POLITIQUE
Publié le 15 septembre 2024
Cette intervention magistrale de Dominique de Villepin, qui corrige Emmanuel Macron à la Fête de l'Humanité
OPINION
Dominique de Villepin critique Emmanuel Macron et appelle à un gouvernement d'union nationale
L’ancien Premier ministre, Dominique de Villepin, était l’invité de la traditionnelle "Fête de l'Humanité" ce dimanche 15 septembre. Lors de cette intervention, il a exposé ses vues sur la situation politique et sociale actuelle en France, exprimant des critiques virulentes à l’égard du président Emmanuel Macron. Pour Villepin, la France traverse une période de crise qui pourrait bien conduire à une « crise de régime ». Il déplore que Macron se soit, selon lui, éloigné des « exigences démocratiques » et qu'il ait manqué de méthode dans sa gestion des récentes crises politiques.
Dominique de Villepin a rappelé qu’il avait pris position dès le lendemain de la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron. À cette occasion, il avait déjà insisté sur l’importance de respecter l’ordre et la méthode, notamment en donnant la priorité à la voix des Français. Il a critiqué la décision de Macron de ne pas donner de suite à la victoire du Nouveau Front Populaire (NFP) lors des élections législatives, affirmant que ce dernier « méritait sa chance ». Il suggérait ainsi que le président aurait dû nommer un Premier ministre issu du NFP, respectant le choix des urnes.
L’impasse démocratique et la légitimité du pouvoir
Villepin s’est interrogé sur la capacité du Nouveau Front Populaire à élargir ses alliances pour former un gouvernement majoritaire, mais il a insisté sur le fait que ce n’était pas au président de la République de répondre à cette question à la place du NFP. Selon lui, le refus de Macron de donner au NFP l'opportunité de former un gouvernement reflète une anomalie démocratique. « Aujourd'hui, c’est le parti arrivé en dernier qui forme le gouvernement », a-t-il déclaré, dénonçant ainsi ce qu’il perçoit comme un contournement des résultats électoraux.
Dans son discours, Dominique de Villepin a également abordé la nomination du nouveau Premier ministre, Michel Barnier. Il a salué ce dernier comme « un homme d’expérience et de dialogue », soulignant les qualités que Barnier a démontrées lors de son passage à Bruxelles en tant que commissaire européen. Toutefois, Villepin a tenu à préciser que « Bruxelles n’est pas le Parlement français », laissant entendre que les défis auxquels Barnier sera confronté en France seront d'une tout autre nature, notamment en raison du climat politique tendu et de la fracture sociale grandissante.
Le parallèle avec l’héritage gaulliste
Au cours de son intervention, Dominique de Villepin a fait référence à l’époque du général de Gaulle, soulignant l’importance de la pluralité politique dans la gestion des crises. Il a rappelé que de Gaulle avait formé un gouvernement pluriel, rassemblant des membres issus de différents partis politiques et sensibilités, dans un esprit de consensus national. Pour Villepin, ce modèle pourrait être une solution à la crise actuelle. « Un gouvernement d’union nationale serait une réponse possible », a-t-il déclaré, appelant ainsi à une coopération entre les forces politiques, quelles que soient leurs divergences, pour sortir de l’impasse actuelle.
Cette proposition d'union nationale résonne comme un écho à l’une des valeurs fondamentales de la Ve République : l’unité dans la diversité. En suggérant une telle option, Villepin montre sa volonté de dépasser les clivages partisans pour privilégier l'intérêt général et la stabilité du pays. Il semble également plaider pour un retour à un exercice du pouvoir plus inclusif, où le dialogue et le compromis priment sur la confrontation et les décisions unilatérales.
L’avertissement contre la « politique du pire »
Dominique de Villepin a terminé son discours en lançant un avertissement clair à la classe politique : il exhorte les différents acteurs à ne pas jouer la « politique du pire ». Cette expression, souvent utilisée pour dénoncer des stratégies visant à aggraver une situation dans l’espoir d'en tirer un bénéfice politique, reflète l’inquiétude de Villepin face aux tensions croissantes dans le pays. Il craint que certains responsables politiques ne cherchent à exacerber les divisions au lieu de travailler à trouver des solutions.
L’ancien Premier ministre se positionne comme un observateur critique et averti de la scène politique française, proposant des pistes de réflexion pour surmonter la crise actuelle. Son appel à un gouvernement d’union nationale et à un retour à une pratique démocratique plus respectueuse des choix des électeurs pourrait trouver un écho chez une partie de la population, lassée des conflits incessants au sein de la classe politique.
Par Tony Houdeville