POLITIQUE

Publié le 25 mai 2021

Pourquoi l'Union européenne ne sera jamais démocratique ?

Thomas Porcher était l'invité d'Elsa Margueritat ce lundi 24 mai 2021 pour la web-tv «Le Média».

«L'Europe a un gros passif sur les questions démocratiques»

Elsa Margueritat: «Alors Thomas, l'idée d'une convention collective, c'est un thème qui est très cher à Emmanuel Macron, ça donne un peu l'impression qu'il y a une forme de démocratie. Est-ce que sur la question de l'Union européenne, c'est une bonne idée?» Thomas Porcher: «Toutes ces questions de conventions citoyennes, de faire intervenir les citoyens, c'est fait pour occuper le terrain sans rien changer. On l'a vu avec la convention pour le climat où là on a occupé des gens pendant un an. Pendant un an on s'est vanté d'être un président qui prend la question du climat à coeur et qui fait intervenir des citoyens et puis, à la fin, il n'en reste rien ou pas grand chose. On prend un peu ce qu'on veut et on prend toujours les trucs les moins forts en termes de réformes et comme ça on les met dans une loi et tout le monde est content. Donc là c'est la même chose, et pareil, l'Europe a un gros passif sur les questions démocratiques, un énorme passif ! Le "non" à la Constitution en 2005, les Français ont voté majoritairement "non". Alors on leur a repasser le traité constitutionnel.»

«Je pense qu'il faut refuser ce type de mascarade»

Thomas Porcher: «Les Grecs en 2015, ils ont voté "oxi" donc "non" aux réformes de l'Europe, on leur a repassé. Il y a eu plein de consultations citoyennes qui ont déjà été faites sur les tribunaux des traités de libre-échange. Il y a 95% des citoyens qui ont répondu "non". Et on leur a imposé quand même. Donc là dire qu'on va faire, sur le modèle de la convention citoyenne, participer les jeunes et d'autres à ce que doit être l'avenir de l'Europe, on sait comment ça finira. Je pense qu'il faut refuser ce type de mascarade. Il faut vraiment refuser ce type de mascarade parce qu'on sait que voilà, la vraie question européenne aujourd'hui c'est sur la question de la matrice, c'est-à-dire les déficits structurels, la concurrence, le marché unique, etc. Et là-dessus, on sait que ça ne fonctionne pas très bien. C'est pas demander "est-ce qu'on veut Erasmus un mois de plus", "est-ce qu'on veut une bourse", enfin c'est des bêtises ça, c'est vraiment rien du tout. C'est juste pour occuper le terrain et dire qu'on fait des choses, qu'on veut rendre l'Europe plus démocratique, qu'on est bien conscients qu'il y a des problèmes dans l'Europe. Mais sans ne vouloir rien changer au final.»

«On a bien vu l'autoritarisme de la Commission européenne»

Elsa Margueritat: «Autre déni de démocratie révélé par la crise grecque ou même 2005 en France. Sur quels thèmes se fondent aujourd'hui l'euroscepticisme?» Thomas Porcher: «Je pense que tout le monde a bien vu ce qu'il s'est passé ces 10 dernières années, il y a eu une crise américaine qui a été transformée en crise de la zone euro. Et on a bien vu l'autoritarisme de la Commission européenne. Enfin, là il nous parle de démocratie participative et de consultation citoyenne mais Juncker il avait résumé ce qu'était la zone euro ou l'Europe. Il avait dit "la démocratie ne peut pas s'exprimer contre les traités". C'est ce qu'il a dit. Donc, si on exprime la démocratie dans le cadre, et bien ça revient à faire le Grand Débat, ça veut dire que in fine, on pourra dire qu'on ne pourra pas faire grand chose, ou un petit peu. Rajouter à droite à gauche, deux ou trois trucs. Et on vous dira "oui mais c'est mieux que rien, on avance pour changer l'Europe, arriver à l'Europe social". Mais on n'y arrivera pas, voilà, Juncker l'avait dit et Macron c'est pareil.»

«Macron il avait un programme qui était aligné sur ce que demandait la Commission européenne. Et encore aujourd'hui»

Thomas Porcher: «Macron il avait un programme qui était aligné sur ce que demandait la Commission européenne. Et encore aujourd'hui, il fait son plan de relance mais il donne des gages pour l'assurance chômage, il donne des gages sur la réforme des retraites. Donc voilà, moi je ne pense pas qu'il y ait une volonté de changer le cap de l'Europe, il y a juste une volonté d'occuper l'espace, c'est tout. Et l'euroscepticisme vient du fait, encore une fois, de ce que vivent les Français dans leur vie de tous les jours, ou les Européens dans leur vie de tous les jours. Ils voient le chômage de masse, ils voient que l'Europe ne protège pas contre les délocalisations. Ils voient que l'Europe ne protège pas non plus contre la question du réchauffement climatique. Ils se rendent compte que les salaires des gens de la commission sont mirobolants. Mirobolants, c'est des salaires de plus de 20.000 balles. Que des commissaires européens bossent au climat et finissent chez Volkswagen ou d''autres qui finissent chez Goldman Sachs. Et bien ils se demandent après si l'Europe sert finalement les Européens ou si elle sert ces dirigeants européens qui lancent des grandes phrases comme ça. Je pense que les gens ont déjà la réponse.»



À découvrir aussi...

Partager cette page