SANTÉ
Publié le 16 janvier 2021
Crédit vidéo : Ass. Nationale
Source : https://assemblee-nationale.fr
Martine Wonner à l'Assemblée: «Combien de suicides ou de tentatives de suicide devrons-nous encore comptabiliser ?»
Le discours de la députée Martine Wonner lors de la séance publique à l'Assemblée nationale le mardi 12 janvier 2021
«Le gouvernement n'a pas compris la jeunesse, encore moins sa souffrance actuelle»
Martine Wonner: «Monsieur le Président, Madame la ministre, chers collègues. Que nous soyons amenés à débattre quant à la jeunesse prouve déjà qu'il existe dans notre pays une profonde scission entre ceux qui gouvernent et la jeunesse. Dans son plan jeunes, le gouvernement semble avoir compris que les conséquences économiques de la crise sanitaire, qu'il a lui même engendrée, touchent de plein fouet les jeunes qui en sont les premières victimes. Mais le gouvernement n'a pas compris la jeunesse, encore moins sa souffrance actuelle. Université fermées, difficultés économiques majeures, crise alimentaire sans précédent, la voici la réalité. Combien de suicides ou de tentatives de suicides devons nous encore comptabiliser ? L'urgence, ce n'est pas agir dans le futur, c'est agir maintenant.»
«Comme s'il fallait mieux traiter en urgence les effets que les mots»
Martine Wonner: «C'est un véritable plan Marshall pour la jeunesse que le gouvernement devrait nous présenter. Le plan jeunesse est d'ailleurs totalement caduc puisqu'il ne prévoyait pas les décisions prises lors de la gestion de cette crise sanitaire. Connaissons-nous exactement le nombre d'étudiants décrocheurs cette année ? Connaissons-nous exactement l'état de l'université en France ? La triste vérité, c'est que la seule chose qui intéresse le gouvernement à propos de l'université, c'était de délectualiser le blocage des universités comme s'il fallait mieux traiter en urgence les effets que les mots. Après tout, ce gouvernement ne nous a-t-il pas habitués à cela ? De quoi avez-vous donc peur ? Que les étudiants se rendent compte de la situation dans laquelle ils ont été enfermés et qu'ils protestent ? Que les étudiants puissent remettre en cause les décisions quant à leur avenir ? Le gouvernement promet qu'il ne laissera aucun jeune sans solution, en proposant des mesures adaptées à chaque situation.»
«Les files d'attente devant les banques alimentaires»
Martine Wonner: «Quelles solutions proposez-vous aux milliers de jeunes qui doivent aujourd'hui se mettre dans les files d'attente devant les banques alimentaires pour se nourrir ? Quelles solutions proposez-vous pour ces mêmes jeunes qui ne peuvent plus étudier ni se nourrir socialement ? Le groupe Liberté et Territoire salue bien évidemment certaines décisions, comme le ticket à 1 euro pour les étudiants boursiers ou la revalorisation de la rémunération des stagiaires en formation professionnelle. Mais l'urgence, mes chers collègues, c'est de régler ce premier problème qui est vital pour tous les étudiants, parmi lesquels ceux dites de classe moyenne, dont les parents ont parfois perdu leur emploi de par la gestion de la crise sanitaire et qui se retrouvent en dehors de tous les radars. Une politique sociale ambitieuse en faveur des jeunes n'est pas seulement nécessaire, elle est aujourd'hui une question de vie ou de mort pour nos étudiants, nos jeunes travailleurs, nos enfants.»
«Offrir aux jeunes un avenir, c'est aussi refuser la logique de la précarisation des contrats»
Martine Wonner: «Vient ensuite la question de la formation. Les formations sont en effet parfois peu adaptées au nouveau marché du travail. Je pense ici tout particulièrement au domaine du numérique, qui est le parent pauvre des politiques publiques en matière d'éducation en France et qui, pour le groupe Liberté Territoires qui le déplore, se retrouve délaissé par le plan jeunes du gouvernement. Nous devons mettre les technologies de demain à l'honneur dans nos universités. Nous devons développer de véritables campus numériques publics qui seront capables de faire naître et accompagner autant de pépites que de jeunes talents dont je sais la France dispose tant. Pour former et diriger nos futurs talents vers les métiers d'avenir, vivier d'emplois, il faut que nos jeunes disposent de formations publiques de qualité. Offrir aux jeunes un avenir, c'est aussi refuser la logique de la précarisation des contrats.»
«Si on n'a ni espoir ni perspectives d'avenir à 19 ans, il nous reste quoi ?»
Martine Wonner: «Où est la promesse du candidat Emmanuel Macron de lutter contre les contrats courts ? Quel avenir est possible lorsqu'ils doivent enchaîner les stages, puis les CDD ? Quel avenir est possible lorsque nos jeunes n'arrivent plus à payer leur logement avec leur premier salaire ? Faut-il encore qu'ils en aient un. Mes chers collègues, nos enfants nous regardent. Nous devons rouvrir d'urgence l'ensemble des salles de classe, les amphithéâtres d'universités, les salles de TD et de cours. Nous devons rouvrir les lieux de socialisation de la jeunesse. Nous devons relancer l'économie pour que les jeunes puissent à nouveau retrouver les moyens de leur subsistance. Il est urgent d'agir non plus contre les jeunes, mais pour les jeunes, non plus contre l'université, mais pour l'université, non plus contre l'avenir, mais pour leur avenir. Madame la ministre, j'aimerais vous lire quelques mots qui ont été écrits aujourd'hui au président Emmanuel Macron par Heidi Soupault, 19 ans, qui est en deuxième année de sciences politiques à Strasbourg. A 19 ans, monsieur le président, j'ai l'impression d'être morte. Pourtant, il neige aujourd'hui à Strasbourg. De jolis flocons virevoltent dans le ciel. Je les observe au chaud, mais cela ne me fait rien. Parfois, je pleure devant mon ordinateur. Ma vie n'a aucun sens et mon avenir est bouché. Si on n'a ni espoir ni perspectives d'avenir à 19 ans, il nous reste quoi ?»