POLITIQUE

Publié le 31 mars 2022

« Complètement délirant » Ces millions qui vont dans la poche des cabinets de conseil

Matthieu Aron et Caroline Michel-Aguirre étaient les invités de l'émission « Quotidien » diffusée sur TMC ce mardi 29 mars 2022.

« Des millions d'euros de contrats à une cinquantaine de cabinets de consultants »

Matthieu Aron : « Ce qui est complètement fou, c'est qu'il y a plein d'exemples où on voit effectivement qu'il y a des missions qui sont confiées à ces consultants, alors qu'il existe les compétences dans l'administration. Il y a plein d'exemples. Par exemple, on parle beaucoup aujourd'hui de la participation citoyenne, des grands débats qu'on organise. Il y a trois organismes, ça fait déjà beaucoup, trois organismes en France qui sont chargés d'organiser cette participation citoyenne. Bon, c'est la France. Eh bien, ça ne suffit pas, on donne aujourd'hui des millions d'euros de contrats à une cinquantaine de cabinets de consultants qui sont spécialisés dans l'organisation de ces débats participatifs. Ça pose quand même des questions. Autre exemple complètement délirant et puis j'arrête là – tout ça, on le raconte dans le livre –, vous avez l'idée de mettre en place une prime de rénovation pour les bâtiments. C'est intelligent, tout le monde est d'accord. »

« Une façon de privatiser aussi le service public, sans le dire »

Matthieu Aron : « Mais qui va la mettre en place ? L'Agence nationale pour l'habitat ou l'Agence nationale pour l'environnement ? Eh bien, on va prendre un cabinet de consultants qu'on va payer 1 million pour décider comment on va organiser cette prime. Est-ce que ça ne paraît pas fou ?! Nous, ça nous est apparu fou. » Yann Barthès : « Dans ce cas précis, qui décide qu'il faut un deuxième cabinet ? » Caroline Michel-Aguirre : « C'est le ministère. » Matthieu Aron : « Dans ce cas précis, c'est venu du ministère. » Caroline Michel-Aguirre : « Et puis, il y a des ressorts un peu moins avouables, qui sont que l'on n'arrive pas à faire passer une réforme, on ne sait pas bien manager ses équipes. Hop, on sort : " C'est pas moi, c'est le consultant. " Ça permet de se couvrir, aussi. Notamment pendant la campagne vaccinale. " Il y a eu un problème ? C'est pas moi, c'est le consultant. " Donc, il y a à la fois de la croyance, à la fois une incapacité à mieux organiser l'État et à ne pas vouloir prendre en main les choses. Une manière de se couvrir. Et puis derrière, à la fin de la fin, une façon de privatiser aussi le service public, sans le dire. » Yann Barthès : « Mais au final, qui prend la décision ? » Caroline Michel-Aguirre : « Le ministère. »

« A 3000 euros la journée. Ça fait cher la logistique. »

Yann Barthès : « Le ministère. Donc, le principal, c'est que la société de conseil ne prenne pas la décision. » Matthieu Aron : « Oui, sauf que, quand vous avez préparé le dossier, quand vous avez fixé plusieurs scénarios. Par exemple, on vous demande de prendre une décision... » Yann Barthès : « Ils orientent la décision, c'est ça ? » Matthieu Aron : « On vous demande d'examiner un dossier, quel qu'il soit. Ces consultants, qu'est-ce qu'ils font ? Ils pondent des rapports, c'est essentiellement ce qu'ils font. Ils pondent des rapports, et dans ces rapports, ils mettent en place trois ou quatre scénarios possibles. Mais ils précisent qu'il y en a un qui a leur préférence. Donc c'est une manière d'aider quand même à la décision. Et à un moment donné, on peut se dire : " Finalement, ils y ont été pour quelque chose. " La voie royale, c'est de devenir consultant. Alors après, on nous explique : " Oui, mais ces consultants, ils sont là, ils font juste un petit peu de logistique. " Je ne vois pas pourquoi on va chercher, dans ces cas-là, des gens qui ont fait HEC, Centrale ou Polytechnique. Il y a quelque chose qui n'est pas logique. » Caroline Michel-Aguirre : « A 3000 euros la journée. Ça fait cher la logistique. »



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