POLITIQUE

Publié le 21 mai 2021

Albert Dupontel dézingue les politiques: «Le bateau coule et là, ils vont se battre pour savoir qui va être le capitaine»

Albert Dupontel était l'invité de l'émission «L'invité de 7h50» diffusée sur France Inter ce mercredi 19 mai 2021.

«Dès l'école, on nous apprend à participer à la compétition sociale»

Léa Salamé: «La crise sanitaire n'a pas renforcé cette anxiété kafkaïenne, cette bureaucratisation, cette déshumanisation ?» Albert Dupontel: «Mais ça commence, pour moi, dès l'école. Dès l'école, on nous apprend à participer à la compétition sociale sans apprendre ce qui se passe en nous. Vous vivez toute une vie avec un parcours intérieur. L'alphabétisation ne va pas de paire avec la créativité à l'école, c'est un drame et c'est la faute de Jules Ferry, ce bâtard !» Léa Salamé: «On apprend quand même des choses à l'école ?!» Albert Dupontel: «On apprend l'alphabétisation, on apprend la collectivité, on apprend à participer à un monde qui, aujourd'hui on le reconnait, est totalement déviant. Donc, il faut changer ça. Je pense qu'un des grands changements qu'on pourrait faire, c'est provoquer des écoles alternatives. Vous aurez, dans 20 ans, une génération très différente, altruiste, humaniste, écologique, etc...»

«Ils n'ont pas de convictions. Ils ont la conviction de vouloir le pouvoir, ils veulent tous le pouvoir !»

Léa Salamé: «C'est ça qui manque aujourd'hui aux hommes politiques ? Les mots du coeur ?» Albert Dupontel: «C'est parce qu'ils n'ont pas de convictions. Ils ont la conviction de vouloir le pouvoir, ils veulent tous le pouvoir ! C'est pour ça que je les mets un peu tous dans le même panier. Le bateau coule et là, ils vont se battre pour savoir qui va être le capitaine dans quelques mois pour les élections présidentielles. C'est un peu flippant quand même, vous comprenez ? Il devrait y avoir un gouvernement d'union nationale, des gens qu'arrêtent de se battre et de s'engueuler, enfin, ça devrait être possible. Il n'y a pas 36 solutions aux problèmes, certes, c'est peut-être compliqué, mais il n'y en a qu'une. Mais avant que le "monde d'avant" change, ils vont s'accrocher avant que le "monde d'après" arrive. C'est ça qui me fait peur. Il y a une phrase de Laborie qui dit : "L'intelligence se fout de la compétition" et j'ai remarqué que j'étais très couillon quand j'étais en compétition.»

«Ils vont dans les banques ou à l'Elysée, voire les deux»

Léa Salamé: «Vous ne pensez pas que ça peut stimuler l'intelligence, la compétition ?» Albert Dupontel: «On peut stimuler l'intelligence sans faire de la compétition. Dans la compétition il y a toujours un vainqueur et beaucoup de perdants. Parmi ceux qui sortent de l'école, il y a ces meilleurs élèves qui finissent dans des écoles élitistes, ils vont dans les banques ou à l'Elysée, voire les deux. Ça peut éventuellement passer pour un échec. C'est pour ça que ce qu'on appelle "la brillance intellectuelle"ce n'est pas forcément l'intelligence. L'intelligence, c'est se connaître soi-même. Pour se connaître soi-même, il faut accéder à la créativité. Les enfants sont des petits génies qu'apprennennt à marcher et parler tout seul. Et à partir de ça, on en fait des "bêtes à concours" dans les écoles.»

«Le problème, c'est que nous sommes conditionnés, conditionnés pour ne pas être intelligents»

Léa Salamé: «Ma seule ambition est d'offrir aux gens une distraction à partir de mes névroses que j'essaye de rendre drôles. Qu'est-ce qui nourrit vos névroses, Albert Dupontel ? L'injustice, la situation de la planète ?» Albert Dupontel: «Vous êtes en train de me parler, vous êtes tous masqués. Déjà ça, ça peut rendre n'importe qui un peu névrotique.» Léa Salamé: «J'invite les gens à regarder votre masque, parce que vous avez un masque "Adieu les cons".» Albert Dupontel: «C'est un collector. Le problème, c'est que nous sommes conditionnés, conditionnés pour ne pas être intelligents. En gros, c'est ce que je dis, donc c'est ça qui permet de se réfugier. Encore une fois : un tableau, une sculpture, un bouquin, un film, ça fait du bien. On ne peut pas être intelligent sans se connaître soi-même. Et se rencontrer c'est quelque chose que les dominants, qu'ils soient politiques, religieux ou marchands n'aiment pas trop, ils n'aiment pas qu'un peuple se rencontre. Et pour la culture, ça va être bien ces jours-ci, on va pouvoir enfin un peu réfléchir, un peu se voir sur les écrans.»

«Ils me font peur! Et la névrose c'est une forme de peur»

Léa Salamé: «Est-ce que les hommes politiques développent vos névroses ?» Albert Dupontel: «Ils me font peur! Et la névrose c'est une forme de peur.» Léa Salamé: «Pourquoi ils vous font peur ? Vous dites que ce sont des grands narcisses terrifiants. Vous dites : "Tout le monde a des doutes sur lui-même, sauf les politiques".» Albert Dupontel: «Oui, vous avez vu les gars comment ils peuvent se planter et ensuite dire l'inverse la semaine d'après. Et je ne parle pas uniquement du pouvoir actuel, ça fait quatre décennies. Ils peuvent avoir des passés troubles comme Mitterrand et prétendre à la plus haute place et y arriver. Ce sont des gens qui foutent les jetons. Même le fonctionnement est assez fascinant sur le plan psychique. Comment ils osent faire ça ? Je ne sais pas. Alors il y a des gens très purs et convaincus. Vous avez eu durant le 20ème siècle Clémenceau et De Gaulle qui étaient plus que des hommes politiques, c'était des gens convaincus.

«Vous avez des gens d'une humilité totale qui arrivent, avec à peine leur CAP, et qui passent leur temps à s'excuser d'être là»

Albert Dupontel: «Aujourd'hui, ce qu'il manque, ce sont de vraies convictions, pour peu qu'elles ne soient pas fachistes, ça nous arrangerait. Mais des convictions altruistes, humanistes, écologiques. Pourquoi pour l'écologie faut-il être de gauche ? Par-exemple ça je ne comprends pas. L'Écologie, c'est un truc pour tout le monde. Le bateau coule et il y a des gens de gauche qui vont venir réparer ?! Ça ne va pas, il y a un truc qui ne va pas!» Léa Salamé: «La convention citoyenne ça vous a intéressé ?!» Albert Dupontel: «J'ai trouvé ça formidable. Regardez le documentaire qui a été fait sur Arte. Vous avez des gens d'une humilité totale qui arrivent, avec à peine leur CAP, et qui passent leur temps à s'excuser d'être là. Ils ont sorti des mesures extraordinaires qui maintenant, si j'ai bien compris, ne vont même pas passer par le référendum. Donc ça, c'est un peu effrayant.»



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