POLITIQUE

Publié le 29 octobre 2021

L'intervention saisissante d'une députée: «En Macronie, les pauvres n'existent pas !»

Mathilde Panot, députée, intervenait lors de la séance publique à l'Assemblée nationale ce jeudi 28 octobre 2021.

«En Macronie, les pauvres n'existent pas»

Mathilde Panot: «En Macronie, les pauvres n'existent pas. Non, ils n'existent pas car si des Français étaient pauvres, vous n'auriez probablement pas réformé l'aide au logement, ni baissé les allocations de 5 euros, ni encore désindexé le montant des APL au pourcentage de l'inflation. D'après une étude récente, cette réforme aurait fait plus de perdants que de gagnants, avec près de 30% d'allocataires ayant vu leur niveau d'APL baisser de 73 euros par mois en moyenne. Cette réforme touche particulièrement les jeunes, puisqu'avec le nouveau mode de calcul, un étudiant dont le revenu augmente entre la fin de ses études et son premier emploi ne percevra plus les APL, bien que son revenu soit encore faible. Mais rappelez-vous en Macronie les pauvres n'existent pas. Donc, cette réforme n'aura fait que des gagnants. La preuve grâce à elle, l'Etat a pu économiser 1,1 milliard d'euros en 2021. Comment des pauvres peuvent-ils produire autant de richesses ? C'est bien parce qu'ils sont riches et que les pauvres n'existent pas. Autre preuve si vous n'en étiez pas déjà convaincu, vous baissez dans votre budget les crédits alloués aux associations qui oeuvrent à l'information relative au logement et à l'accompagnement des personnes en difficulté, moins 16,81 %, pourquoi ? Parce qu'il n'y a pas besoin d'informer ou d'accompagner des personnes qui n'existent pas. Vous aviez supprimé l'Observatoire de la pauvreté pour la même raison.»

«Cette réduction pèse lourdement sur leurs ressources en atteignant 1,3 milliard d'euros cette année»

Mathilde Panot: «L'Observatoire n'ayant rien à observer, il était aussi absurde de le maintenir que de créer, pourquoi pas, un observatoire des licornes ? Après tout, après tout, s'il y avait des pauvres en France, il faudrait construire plus de logements sociaux. Or, leur construction s'est effondrée. En 2020, 87 500 logements ont été agréés pour un objectif de 110 000 logements. 1,7 million de familles sont en demande d'un logement social et quand on compte les demandeurs déjà logés dans le parc social, ce chiffre s'élève à 2,2 millions de familles en tout. Mais depuis 2017, vous avez fortement ponctionné les recettes des organismes HLM. Ces organismes ont dû compenser la baisse des APL en accordant une réduction de loyer de solidarité. Cette réduction pèse lourdement sur leurs ressources en atteignant 1,3 milliard d'euros cette année, tant et si bien que ces organismes ont dû rogner sur l'entretien des immeubles et réduire leur production de logements neufs. Mais si vous appauvrissez autant les organismes HLM, on s'imagine que la demande a dû baisser. Autrement, vous n'auriez pas augmenter la TVA sur la construction de logement social pendant votre quinquennat, celle-ci passant de 5,5% à 10%, c'est bien que nous n'avons pas besoin de logements sociaux puisque les pauvres n'existent pas. Et si dans les outre-mer, le nombre d'habitats insalubres est estimé à 100 000 d'après le ministère de la Transition écologique et que 70% de nos compatriotes ultramarins sont éligibles à des logements sociaux. Là encore, c'est limpide. C'est que les outre mer n'existent pas.»

«Il est majoritairement utilisé pour des petits travaux»

Mathilde Panot: «Par ailleurs, aucun gouvernement, certainement pas le vôtre, ne laisserait des réseaux de canalisations en ruine, empêchant les habitants de se laver les mains en pleine crise sanitaire. Non, de toute façon, si les pauvres existaient, ils seraient probablement victimes de précarité énergétique et vous en feriez les premiers bénéficiaires d'une aide à la rénovation thermique des logements. Or, votre dispositif "Ma prime rénov" est ouvert à tout le monde et le reste en charge pour les plus précaires est de 20%. Il est majoritairement utilisé pour des petits travaux simples comme l'isolation des fenêtres ou le changement de chaudière, et non pour une rénovation performante qui permettrait d'éliminer les passoires thermiques et qui garantirait des gains de consommation énergétique. Cette mascarade vous permet de gonfler artificiellement les chiffres de la rénovation énergétique sans jamais vous attaquer aux logements classés aux étiquettes les plus basses. Mais ce doit être parce que les logements nécessitant une rénovation globale n'existent pas et ceux qui les occupent non plus, tout comme n'existent pas les quartiers populaires ou les zones rurales et leurs habitants. La preuve l'Etat y est absent puisque les services publics ont déserté. Pour finir, sachez collègues que depuis fin 2017, les pauvres à la rue n'existent pas non plus. C'est Emmanuel Macron qui l'avait dit, je le cite : " La première bataille, c'est de loger tout le monde dignement. Je ne veux plus, d'ici la fin de l'année, avoir des femmes et des hommes dans les rues. "»

«2 millions de personnes privées d'accès à l'eau courante»

Mathilde Panot: «Pourtant, d'après le Collectif des morts à la Rue, 587 personnes sans abri sont mortes en 2020, dont une personne sur quatre d'une mort violente. Ce bilan non exhaustif est sûrement beaucoup plus lourd mais il donne raison au président de la République, quelque part, les pauvres n'existent plus et ils continueront à disparaître, parfois brutalement, parfois lentement, faute de ressources d'accompagnement aussi longtemps que la politique du logement ne sera un droit que pour ceux qui peuvent se le payer. Un mot encore pour les 300.000 personnes qui vivent dans la rue avec pour certains, des enfants, aux 15 millions de personnes touchées par le mal au logement dans notre pays, aux 2 millions de personnes privées d'accès à l'eau courante, à un moyen de chauffage, à une douche ou encore à un coin cuisine, à tous ces invisibles qu'il serait plus simple pour vous d'imaginer qu'ils n'existent pas.»



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