POLITIQUE

Publié le 01 septembre 2022

Retraites : Élisabeth Borne embarrassée après la démonstration de Clément Viktorovitch

Élisabeth Borne était l'invitée de l'émission « Quotidien » diffusée sur TMC ce mardi 30 août 2022.

« J'ai regardé plus en profondeur dans votre discours »

Clément Viktorovitch : « Bonsoir, Madame la Première Ministre. Je me suis en effet penché sur vos trois grandes déclarations depuis votre nomination : hier devant le Medef, ce week-end devant votre parti, Renaissance, et en juillet devant l'Assemblée nationale. Trois discours liés par un thème commun : votre volonté de rassembler par le dialogue et le compromis. » Élisabeth Borne : « Je vous propose de bâtir ensemble / Travaillons ensemble / Pour bâtir ensemble / Je m'engage à ne jamais rompre le fil du dialogue / Bâtir des compromis / Nous aborderons chaque texte dans un esprit de dialogue, de compromis et d'ouverture. » Clément Viktorovitch : « Un esprit d'ouverture, donc, du moins c'est ce que vous dites explicitement. Mais j'ai également regardé plus en profondeur dans votre discours et j'ai remarqué un tout petit mot, mais qui revient très souvent. » Élisabeth Borne : « Nous devons continuer à protéger les Français / Nous devons mieux lutter contre les gaspillages / Nous devons être transparents / Nous devons faire plus. »

« Le verbe devoir, c'est ce qui exprime une obligation impérieuse »

Clément Viktorovitch : « Et encore, c'est un tout petit échantillon. J'ai compté 62 " nous devons " dans votre seul discours à l'Assemblée nationale. Ça fait un toutes les 90 secondes. C'est considérable et ce n'est peut-être pas anodin. Le verbe devoir, c'est ce qui exprime une obligation impérieuse. Vous présentez donc, au fond, la quasi-totalité de votre programme de gouvernement comme s'imposant à vous. Alors, c'est vrai qu'il y a des devoirs juridiques : respecter l'accord de la COP 21, par exemple. Vous mentionnez aussi des devoirs moraux : " protéger les Français ". Mais dans vos " nous devons ", il n'y a pas que cela. Voilà notamment comment vous nous présentez votre réforme des retraites. » Élisabeth Borne : « Pour la prospérité de notre pays et la pérennité de notre système par répartition, oui, nous devrons travailler, progressivement, un peu plus longtemps. » Clément Viktorovitch : « Bon, on entend bien cette idée que travailler plus longtemps serait une nécessité absolue. Et pourtant, j'ai regardé dans le dernier rapport du Conseil d'orientation des retraites, qui fait autorité. »

« Les dépenses de retraite restent sur une trajectoire maîtrisée jusqu'en 2070 »

Clément Viktorovitch : « Il est bien précisé que les dépenses de retraite restent sur une trajectoire maîtrisée jusqu'en 2070. Et le rapport ajoute, très précisément, selon les préférences politiques qu'on souhaite assigner aux finances publiques, il est légitime de défendre que ces niveaux sont trop ou pas assez élevés. D'après le Conseil d'orientation des retraites, on peut donc exiger des Français qu'ils travaillent plus longtemps, mais on ne le doit pas. Et cela m'amène à ma question. Bien sûr, présenter vos choix politiques comme relevant d'une obligation et n'étant donc pas soumis à discussion, c'est une stratégie rhétorique redoutable. Mais est-elle bien conforme à cet esprit d'ouverture et de compromis que vous ne cessez de revendiquer ? » Élisabeth Borne : « Alors, peut-être, on ne va pas ouvrir un débat sur les retraites. Moi, je suis convaincue que les Français sont attachés à notre modèle social. Je vous l'ai dit et je pense que personne n'a envie d'être moins bien protégé des aléas de la vie, demain. Et je crois que c'est aussi important de dire la vérité aux Français. »

« C'est une conviction forte, c'est un choix ?! »

Élisabeth Borne : « La réalité, c'est qu'en France, on travaille moins, les jeunes, la part des jeunes qui ont un emploi est sensiblement plus faible que dans d'autres pays de l'Europe, de l'OCDE. Et la part des seniors qui ont un emploi est aussi plus faible. Donc moi, je pose la question : quelle serait la recette miracle qu'on aurait trouvée en France pour financer un modèle social plus généreux que la plupart de nos voisins, en travaillant moins ? » Clément Viktorovitch : « C'est pourtant ce que dit le Conseil d'orientation des retraites. » Élisabeth Borne : « Je ne vais pas vous faire l'exégèse du Conseil d'orientation des retraites, mais je vous assure... Enfin, voilà, c'est une conviction forte. » Clément Viktorovitch : « Mais c'est une conviction forte. C'est un choix ?! » Élisabeth Borne : « Après, quand je dis " nous devons ", je vous rassure, sur les bancs de l'Assemblée nationale, tout le monde n'est pas d'accord avec moi et je l'entends. » Yann Barthès : « Ah bon ? C'est dingue ! » Élisabeth Borne : « Je l'entends, voilà. »



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