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Publié le 28 décembre 2022

« Il faut accepter de payer un peu plus cher la baguette. » Le cri d'alarme du président de la CNBPF

Dominique Anract, Président de la Confédération Nationale de la Boulangerie-Pâtisserie Française (CNBPF), était l'invité de l'émission « Apolline Matin » diffusée sur RMC ce vendredi 23 décembre 2022.


“ Le prix de la baguette devra augmenter mécaniquement. ”

Apolline de Malherbe : « Vous venez pour alerter parce que le prix de la baguette devra augmenter mécaniquement. À un moment, il faut que vous puissiez rentrer dans vos comptes et vous payez beaucoup plus cher la fabrication. » Dominique Anract : « Tout à fait. Alors il y a plusieurs sujets, c'est déjà le toute la matière première puisqu'on sait que la farine c'est 30 %, la levure 70, le sel, etc. Les salaires qui ont pris aussi 8 % cette année. Et là, aujourd'hui, l'énergie qui va grosso modo doubler. Alors ce n'est pas quatre ou cinq fois, ce sera quand même doublé. Donc là, en fait, tout le compte de résultat va monter. Et c'est vrai que cette baguette qui a pris 22 centimes en 20 ans... » Apolline de Malherbe : « Vous avez entre les mains une baguette tradition, c'est plutôt la baguette tradition qui va augmenter ou c'est toutes les baguettes et tout le pain ? » Dominique Anract : « Vous savez, grosso modo, ce qu'on préconise c'est d'avoir entre 3 et 5 % d'augmentation, c'est-à-dire ça reste des centimes quand même. Mais il faut avoir cette augmentation, déjà pour prendre l'énergie qui va augmenter. » Apolline de Malherbe : « Ça veut dire qu'on va avoir du pain à combien ? Une baguette, une baguette tradition, en moyenne, vous diriez qu'elle va être à combien en janvier ? »


“ Ils sont découragés. ”

Dominique Anract : « Vous savez que la moyenne de la baguette générale, tous marchés confondus, est à 0,93 en France. Donc là, on pourrait dire que ce soit, à la limite que ça passe à 0,98. Ensuite, la tradition est un petit peu plus chère puisque c'est fait à la main, longue fermentation, etc. On est aux alentours d'un 1,20 € - 1,10 €. Chaque boulanger fait vraiment son prix par rapport à ses charges. Mais c'est vrai que ça reste, voir 5 ou 10 centimes qu'il peut y avoir d'augmentation. Alors c'est inquiétant, surtout pour les boulangers. Vous savez les clients, on les voit tous les jours et ils ont beaucoup, beaucoup de mal à passer cette augmentation. » Apolline de Malherbe : « Ils ont du mal à passer cette augmentation, ça veut dire quoi ? Ça veut dire que les clients ne suivent pas ou ne veulent pas suivre ? Qu'est-ce qu'ils vous disent les clients ? » Dominique Anract : « D'une manière générale, les clients comprennent qu'en fait ce produit, il y a des hommes derrière et du matériel. Il y a de la matière première et des coûts d'énergie qui explosent. Mais vous savez, comme on les voit tous les jours, par exemple, sur 300 ou 400 clients, il y en ait deux ou trois qui disent : " Ah ben moi c'est fini, je prendrai ma voiture, j'irai la prendre plus loin. " Ils sont découragés. »


“ Il faut accepter de payer un peu plus cher la baguette. ”

Apolline de Malherbe : « Quand vous dites : " Plus loin. " Ça veut dire en supermarché, ça veut dire une baguette qui ne sera pas une baguette artisanale. » Dominique Anract : « Tout à fait. Mais quelques fois, c'est un coup de colère ou une histoire peut-être d'un peu de vexation puisque c'est un véritable contact qu'on a tous les jours avec les clients. Et je vous assure, c'est d'une manière générale, j'ai régulièrement des appels de gens en province et encore hier une dame au Creusot qui me disait : " Mais vous ne vous rendez pas compte, il y en un qui veut prendre sa voiture, aller... ? " Alors que c'est la majorité silencieuse qui accepte en fait cette augmentation pour continuer à avoir ce produit. » Apolline de Malherbe : « Je sens presque une forme d'émotion chez vous parce que c'est pas de gaieté de cœur que vous le faites et vous voulez vraiment prendre le temps de dire à ceux qui nous écoutent, de dire aux Français : " Voilà, on va augmenter ce pain, Il faut qu'on vous le dise, on n'a pas le choix. " » Dominique Anract : « Tout à fait. C'est un message vraiment que je donne aux consommateurs en disant : " Écoutez, si vous voulez garder votre boulangerie dans le petit village ou dans le quartier, il faut accepter de payer un peu plus cher la baguette. " Et c'est des centimes. »



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