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Publié le 01 septembre 2023

La « Sulfateuse à PV » : cette voiture radar ne fait pas de cadeau !

La fin des agents humains : une déshumanisation du contrôle ?

Alors que les rues de l'hyper-centre de Bordeaux étaient autrefois surveillées par des agents de terrain pour éviter le phénomène des "voitures ventouses", la municipalité semble prendre un virage technologique depuis le 1er janvier 2022. En effet, ces agents, visages humains de la régulation, ont été remplacés par les voitures LAPI - pour Lecture Automatisée des Plaques d'Immatriculation. Une décision qui, loin d'être anodine, marque un tournant profond dans la manière de concevoir la régulation urbaine.

L'argument mis en avant par la municipalité pour ce remplacement radical ? Le renouvellement du marché avec le prestataire Moovia. C'est donc Transdev, acteur majeur du transport, qui a été choisi pour opérer cette transformation. Ces voitures technologiques, prévues pour "organiser le stationnement payant dans la ville", selon Patrick Papadato (conseiller municipal délégué pour la voirie) sillonnent désormais la ville, flashant sans discernement les plaques des véhicules stationnés.

Une surveillance accrue : vers une perte de liberté ?

À première vue, ces voitures, reconnaissables par leur caméra omniprésente, semblent être le remède miracle pour résoudre les problèmes de stationnement. Toutefois, la méthode soulève de nombreuses questions éthiques. En effet, toutes les plaques des véhicules sont scannées, puis analysées dans un centre dédié. Si, pour certains, cela peut représenter une avancée significative en matière de contrôle du stationnement, pour d'autres, cela sonne comme une intrusion massive dans la vie privée des citoyens. Ne saurait-on plus stationner sans être surveillé par une caméra ?

De plus, cette transformation semble minimiser le rôle humain dans la régulation. Certes, certains des 54 agents de terrain de Bordeaux seront reconvertis pour conduire ces voitures ou pour travailler dans les centres de traitement. Mais que dire de la justification avancée par la ville ? À savoir, protéger ces agents des conditions météorologiques parfois difficiles. Ne serait-il pas plus logique de chercher des solutions pour améliorer leurs conditions de travail plutôt que de les remplacer par des machines ?

LAPI : l'efficacité au détriment des droits individuels ?

Le système LAPI, en lui-même, est un prodige technologique. Capable de contrôler plusieurs dizaines de véhicules par minute, il vérifie en temps réel si les automobilistes ont bien payé leur stationnement, que ce soit via des horodateurs ou des applications mobiles. Mais cette prouesse technologique ne cache-t-elle pas un danger latent ?

En effet, en cas d'oubli ou d'erreur, les contrevenants reçoivent un forfait post-stationnement de 35 euros directement chez eux. Cette automatisation du processus de contravention, bien que présentée comme un gain d'efficacité, risque d'exclure toute possibilité de contestation humaine et immédiate, qui existait auparavant avec les agents de terrain. De plus, l'automatisation intégrale du contrôle de stationnement peut augmenter le sentiment d'être constamment surveillé, renforçant une certaine paranoïa urbaine.

Un futur à double tranchant

La ville de Bordeaux, en optant pour les voitures LAPI, embrasse pleinement le virage technologique. Si, sur le papier, cette initiative promet une meilleure gestion du stationnement et une efficacité accrue, elle ouvre aussi la porte à une série de problèmes éthiques, juridiques et sociaux. Dans cette ère de digitalisation, la question demeure : jusqu'où sommes-nous prêts à sacrifier notre vie privée pour un semblant d'efficacité urbaine ? Et surtout, à quel moment la technologie cesse-t-elle d'être un outil pour devenir un maître ?



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