ENVIRONNEMENT

Publié le 18 juillet 2022

Roulez bio ? : Ce reportage nous révèle l'enfumage écologique de certains biocarburants

Hugo Clément intervenait lors de l'émission « Sur le front » diffusée sur France 5 ce lundi 2 mai 2022.

« On nous dit le biocarburant, c'est pour diminuer notre empreinte écologique et on fait traverser des cargos qui tournent au fioul lourd »

Hugo Clément : « À l'intérieur de cet immense bateau, il n'y a qu'un seul produit, un seul, des graines de colza. Naturellement riches en acides gras, qui seront transformées en huile puis en biodiesel. C'est cette image que nous voulions obtenir pour montrer l'absurdité de la production des biocarburants. Nous importons une plante qui pousse pourtant très bien chez nous, en France. » Christophe Noisette : « Là, on voit un énorme cargo et à côté, les camions, ils sont tout petits, ridicules. Et je ne sais pas combien ils vont être pour décharger ça, mais ça va être, des dizaines et centaines, je ne sais pas c'est... C'est impressionnant quoi. » Hugo Clément : « Petite devinette, d'où vient ce colza d'après vous ? De Belgique, du Royaume-Uni, d'Europe centrale ? Vous n'y êtes pas du tout. » Christophe Noisette : « C'est un bateau qui vient d'Australie. » Hugo Clément : « Donc il a traversé la planète pour nous amener du colza australien ? » Christophe Noisette : « Tout à fait. On nous dit le biocarburant, c'est pour diminuer notre empreinte écologique et on fait traverser des cargos qui tournent au fioul lourd. Ça me paraît un peu paradoxal, en fait. »

« Il a fallu brûler près d'un million de litres de fioul lourd, carburant extrêmement polluant »

Hugo Clément : « À l'intérieur de ce vraquier, il y a 44000 tonnes de colza. Ce qui pourrait nous permettre de fabriquer 20 millions de litres de biodiesel. Mais pour le faire venir d'Australie, il a fallu brûler près d'un million de litres de fioul lourd, carburant extrêmement polluant. Et c'est quel type de colza ? » Christophe Noisette : « Il pourrait être transgénique. » Hugo Clément : « Ça veut dire qu'on importe, légalement, de l'autre bout du monde du colza transgénique ? » Christophe Noisette : « Oui. L'Union européenne interdit la culture du colza transgénique, mais autorise l'importation du colza transgénique. Il y a un discours un peu schizophrénique. » Hugo Clément : « Et le consommateur n'est pas au courant. » Christophe Noisette : « Et le consommateur n'est pas au courant puisqu'à la pompe, encore une fois, il n'y a rien de marqué. Si on mettait sur la pompe : biodiesel issu de colza transgénique, il y a de fortes chances qu'ils arrêtent de le consommer. » Hugo Clément : « Est-ce qu'il existe aussi des risques ici en France, du fait d'importer ce colza transgénique ? » Christophe Noisette : « On voit bien sur ces images, les graines s'envolent, c'est pas du tout sécurisé. Et donc le colza, il va se retrouver sur le bord des routes, autour des ports. C'est extrêmement volatile. »

« C'est un colza transgénique mis au point par Bayer »

Hugo Clément : « Effectivement, il suffit de regarder autour de nous pour voir du colza qui pousse à côté du bitume et il n'est pas arrivé là tout seul. Ça, c'est du colza ? » Christophe Noisette : « Ça, c'est du colza issu des déchargements. Ça paraît évident, hein. » Hugo Clément : « Là, ça pousse en plein milieu d'un terre-plein en bord de route. On est juste à côté du port. » Christophe Noisette : « Oui, c'est ça. Ça peut être du colza transgénique. » Hugo Clément : « Bon, bah, on le prend ? » Christophe Noisette : « On le prend. » Hugo Clément : « On va faire analyser ça. » Christophe Noisette : « Voilà, on a notre beau bouquet. » Hugo Clément : « Nous envoyons les échantillons dans un laboratoire près de Caen. Et nous attendons le résultat. » Christophe Noisette : « Donc alors, ce que dit le rapport concrètement, ils disent qu'on a envoyé des tiges, des fleurs, des feuilles, des racines, extrait l'ADN. Après, ils ont analysé cet ADN et se sont rendu compte que dans cet ADN, il y avait le transgène MS8 et le transgène RF3 positifs. » Hugo Clément : « Donc ça, c'est une variété de colza transgénique ? » Christophe Noisette : « Oui, c'est un colza transgénique mis au point par Bayer. Cette variété est complètement interdite à la culture en Europe et en France. »

« Il va pouvoir contaminer des champs comme celui-là »

Hugo Clément : « Comment tu réagis à ces résultats ? » Christophe Noisette : « Je ne suis malheureusement pas surpris. » Hugo Clément : « C'est quoi le risque d'avoir ce type de colza transgénique qui pousse un peu n'importe où ? » Christophe Noisette : « Il va pouvoir contaminer des champs comme celui-là. Et si on retrouve des OGM dans un champ, il faut le détruire. l'Etat va obliger l'agriculteur à le détruire. » Hugo Clément : « Carrément ? » Christophe Noisette : « Carrément. C'est interdit, c'est interdit. » Hugo Clément : « Suite à notre analyse, le ministère de l'Agriculture a décidé de lancer une enquête officielle et d'inspecter l'usine. L'entreprise de biocarburants assure détruire systématiquement les plants qui poussent aux alentours afin d'éliminer le colza génétiquement modifié. Nous commençons à comprendre pourquoi l'industrie du biodiesel est si réticente à nous recevoir. »



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