SANTÉ

Publié le 30 décembre 2020

Ce médecin balance tout sur le passeport vaccinal

Le médécin Gérald Kierzek était l'invité de l'émission «Brunet Direct» diffusé sur LCI ce lundi 28 décembre 2020.

«Ça fait 20 ans qu'on essaie de lutter contre ça»

Éric Brunet: «Ca ne vous plaît pas le passeport vaccinal ?» Gérald Kierzek: «Non. L'idée d'avoir une étiquette comme ça : malade ou pas malade ou vacciné ou pas vacciné, me semble une boîte de Pandore qu'il ne faut pas ouvrir. En tout cas, ça fait 20 ans qu'on essaie de lutter contre ça, contre les discriminations vis-à-vis des gens séropositifs, etc. Je pense que ce n'est pas aller dans le bon sens parce qu'aujourd'hui, c'est vacciné versus pas vacciné, mais demain, ça sera quoi ? Ça sera telle maladie versus pas telle maladie ? On va discriminer, on va faire des lieux pour gens sains et puis des lieux pour gens qui ne sont pas sains ?» Éric Brunet: «On le fait déjà avec le vaccin pour la grippe.» Gérald Kierzek: «Oui, mais il n'y a pas des restaurants avec les gens vaccinés et les gens qui ne sont pas vaccinés. Donc, ce n'est pas Ebola ou ce n'est pas la peste, le coronavirus. Il faut recontextualiser et replacer ça dans la réalité des chiffres et la réalité des chiffres, c'est un taux de mortalité qui est de 0,05 % donc qui est relativement faible, qui touche les plus fragiles. D'ailleurs, ce n'est pas pour rien que ce sont les plus fragiles qui vont bénéficier de cette vaccination. Et aller faire comme ça, cette espèce de passeport de discrimination me semble quelque chose qui n'est pas en rapport avec la gravité de cette maladie.»

«C'est complètement stupide»

Éric Brunet: «Je suis parti cinq jours en Guadeloupe avec ma femme. La compagnie Air Caraïbes m'a demandé, pour embarquer, un test de moins de 3 jours que j'ai fourni. Bon alors c'est de la discrimination ?! C'est une discrimination par le test ! Gérald Kierzek: «Mais c'est complètement stupide, c'est comme prendre la température à l'entrée des magasins ou des bâtiments. C'est complètement stupide, ça ne sert à rien. De même que ces tests PCR ne servent à rien puisqu'à l'instant T, vous étiez négatif, à l'instant peut-être T + 15 minutes, vous étiez positif. Ce que je veux dire c'est que ce n'est pas une garantie absolue. La garantie, c'est : des mesures barrières, porter les masques, etc. Éric Brunet: «Non, la garantie c'est le vaccin. Vous seriez restaurateur, vous auriez un petit estaminet avec 30 couverts à midi, à 300 mètres d'ici, vous seriez fermé depuis un an ou 8 mois, on vous dirait : " Vous pouvez réouvrir, mais à une condition, c'est que les gens qui viennent déjeuner à midi aient été vaccinés. " Vous diriez, oui, formidable ! Gérald Kierzek: «Mais il faut que les restaurateurs rouvrent avec ou sans vaccin. Il faut que les restaurateurs rouvrent avec des mesures barrières, avec la possibilité d'avoir une activité économique, avec des gens qui respectent les mesures barrières. Les restaurateurs ont quand même été vertueux dans cette histoire-là. C'est la double peine parce qu'eux, ils avaient mis les protocoles sanitaires en place et finalement, c'est eux qu'on a fermé alors que l'on voit bien que les lieux de contamination ce ne sont pas forcément les restaurants. Pardon, mais ça n'a rien à voir avec le vaccin. Le vaccin, c'est une problématique médicale avec les gens les plus à risque et on le voit, ce sont les gens dans les EHPAD. Et malheureusement, ce ne sont pas les gens qui vont dans les restaurants.»

«Regardez le président de la République»

Éric Brunet: «On ne parle simplement que d'un document qui dit monsieur est vacciné, par conséquent, il ne risque pas de transmettre une maladie à d'autres. Et c'est de la santé publique. Gérald Kierzek: «Donc, on vous embauche si votre dossier médical est vierge ? Vous voyez quand je parle de boîte de Pandore, c'est vraiment ça. On fait d'une condition médicale parce que c'est quand même ça la vaccination. Une condition médicale, on en fait une condition sociale. C'est-à-dire que si votre dossier médical est vierge et clean, tout va bien, vacciné, etc. Vous allez avoir un boulot, vous allez au restaurant, vous allez voyager, etc. Et si ce n'est pas le cas aujourd'hui, c'est la vaccination, mais encore une fois, demain, ça peut être autre chose, et bien, sur ce dossier médical, et bien vous n'aurez pas les mêmes droits que les autres. Et je ne peux que regretter que mes confrères ne pensent pas comme ça sur le plan éthique et déontologique. Éric Brunet: «Au nom de la non-discimination, Gérald, il faudrait autoriser les personnes qui ont un test positif au Covid 19 à rentrer dans un avion, par exemple, dans un restaurant ou à voyager en Australie, au Danemark, partout ? Gérald Kierzek: «On connaît bien le problème. Il y a des soignants qui avaient un test positif, à qui on a dit, il faut aller bosser parce qu'on a besoin de vous et donc on bossait avec un test positif. Mais à partir du moment où il y a les gestes barrières qu'on appelle les barrières universelles, malade ou pas malade, positif ou pas positif, il n'y a pas plus de risque à la limite, on prend un masque, on se lave les mains et on ne va pas contaminer les autres. Et puis, les bonnes pratiques, encore une fois, c'est de rester isolé pendant 7 jours. Et puis, point barre. Regardez le président de la République, il a été isolé pendant 7 jours et il a pu mener sa vie après normalement.»

«Je vous rappelle que la médiane d'âge des décès, c'est 85 ans»

Gérald Kierzek: «Il y a des vaccins obligatoires en France, Diphtérie, tétanos, polio.» Virginie Le Guay: «Il y en a 11 vaccins obligatoires. Gérald Kierzek: «Il y en a 11 pour les nouveaux-nés, mais pour les adultes, c'est le DTpolio. Pourquoi ? Parce que ce sont des maladies gravissimes. Donc, le bénéfice de la vaccination est largement supérieur aux risques de la maladie. Pour le coronavirus, pour tout un chacun et notamment pour des gens qui sont en bonne santé et qui sont des gens qui peuvent voyager, qui vont au restaurant, etc. Bref, qui ne sont pas en EHPAD et qui n'ont pas 85 ans, je vous rappelle que la médiane d'âge des décès, c'est 85 ans. Elle était de 84 ans, elle a augmenté, elle est de 85 ans pour les morts du Covid. Donc le bénéfice, il est très clair chez les patients, dans les EHPAD, dans les unités de soins longue durée, en gériatrie, il est et reste à prouver chez les autres donc, il faut convaincre, prouver, informer les gens mais ça doit rester du volontariat. On ne peut pas comparer la fièvre jaune et le tétanos et le coronavirus. Ce n'est pas possible. Il faut bien comprendre un truc, c'est que le vaccin protège des formes graves c'est-à-dire qu'il protège non pas du portage du coronavirus mais il protège avant tout, c'est l'efficacité qui est démontrée, les personnes les plus fragiles ne vont pas faire une pneumonie.»

«Mais demain, c'est quoi le deuxième tampon ?»

Éric Brunet: «Vous pensez qu'une personne vaccinée peut contracter la maladie et la transmettre ? Gérald Kierzek: «Ça ne garantit pas le fait qu'il n'y ait pas de portage de ce virus et donc de transmission. On n'a pas de données là-dessus pour l'instant, donc ça veut dire que ce médicalement, à date, ça n'a pas de sens de faire ça pour l'instant. Parce que dans votre restaurant ou dans votre magasin de chaussures, si tout le monde est vacciné, il y a peut-être des gens et même sûrement des gens qui seront quand même porteurs du virus et qui pourront le transmettre quand ils vont visiter le week end après dans leur EHPAD, etc. Donc, encore une fois, les mesures barrières universelles ce que dit le confrère et baisser le niveau de circulation, ça paraît une évidence. Deuxièmement, tester de manière préventive. Troisièmement, renforcer les capacités hospitalières et, quatrièmement, vacciner les plus fragiles. Voilà quelque chose qui est cohérent. On n'en est pas à aller vous mettre je ne sais quoi de coup de tampon en disant voilà, vous pouvez aller vous balader et les autres, vous restez chez vous. J'ai un restaurateur qui m'envoie par Twitter, il me dit ça serait bien que ce passeport soit appliqué aux employes du restaurant. Moi, restaurateur, je ne me vois pas faire du tri dans qui peut ou ne peut pas bosser. Ça veut dire qu'effectivement, il faudrait que les employés aussi, il y aurait ceux qui auraient le passeport et ceux qui n'auraient pas le passeport. Et c'est au restaurateur, l'employeur de faire ce tri-là ? À un moment donné, on rentre dans cette vision de la société qui est assez terrible. Parce qu'encore une fois aujourd'hui, c'est le passeport sans efficacité médicale démontrée en plus, puisque encore une fois, la transmission, on ne sait pas si ça empêche de transmettre et de porter le virus, et puis surtout, c'est cette vision de dire on démarre par le passeport. Aujourd'hui, c'est le tampon coronavirus. Mais demain, c'est quoi le deuxième tampon ?»



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