SANTÉ

Publié le 16 février 2021

L'intervention piquante du Docteur Gérald Kierzek sur la gestion de la crise

Le docteur Gérald Kierzek était l'invité de Marie-Aline Meliyi sur LCI ce lundi 8 février 2021 durant l'émission «On donne le ton».

«On soigne une épidémie de tests et pas de malades»

Marie-Aline Meliyi: «On est sur un plateau en trompe l'œil, docteur?» Gérald Kierzek (Docteur): «J'en sais rien, je pense qu'on évalue mal l'épidémie et notamment avec ces chiffres de tests. On soigne une épidémie de tests et pas de malades: avec des courbes, des chiffres, des projections. Imaginez si nous avions cette même logique avec nos malades ? Nous les médecins de terrain, nous les cancérologues, nous les urgentistes. Si à l'échelle individuelle, avec un patient, on était dans la même logique que ceux qui sont en train de gérer l'épidémie au niveau de Santé Publique, en disant: "Oui, mais vous vous rendez compte, vous risquez le pire, il faut donc qu'on vous fasse ce traitement". Vous ne voudriez pas d'un médecin comme ça. C'est-à-dire que le médecin est dans la balance bénéfices/risques en permanence. C'est ce qu'on fait avec tous nos patients tous les jours. Et j'ai l'impression qu'en termes de santé publique et d'épidémiologie, ils sont pas du tout dans la balance bénéfices/risques, alors que le président lui, est dans la balance bénéfices/risques. Mais ils sont dans: "On voit le pire, donc il faut tout de suite prendre les mesures drastiques, etc.…". Moi, je trouve ça déraisonnable à date. Et encore une fois, je dis à date, parce qu'il faut prendre plusieurs paramètres. Pourquoi les 5.000 cas de contamination? On ne sait pas ce qu'on mesure. On fait des tests positifs et on ne sait pas s'il s'agit de malades ou s'il s'agit d'anciens malades. Si c'est des gens qui ont du virus au fond de la gorge parce qu'ils étaient contaminés il y a 3 mois ou s'il s'agit de nouvelles contaminations ou pas. Donc, on évalue sur des mauvais critères, on n'a pas le bon critère. Moi il y a un truc qui me fait marrer, c'est les 3000 malades. Enfin ça me fait marrer, pardon, c'est pas drôle. Mais 3000 malades en réanimation ?! Si chaque année on confinait le pays pour 3000 malades en réanimation, mais toutes les années depuis 15 ans on serait confiné. Pourquoi? Parce que toutes les années, vous avez des gens qui meurent sur les brancards des urgences pour la grippe, pour des pneumopathies qu'on ne peut pas traiter, qu'on ne peut pas prendre en réanimation parce qu'il n'y a pas de place, parce qu'il y a eu des réductions drastiques de moyens, etc... Ça, il faut le dire aussi.»

«Pourquoi on ne donne pas une marge de sécurité qui permettrait de créer ces lits ?»

Gérald Kierzek: «Et puis, si l'objectif c'est de ne pas saturer les services de réanimation ou si c'est à cause du manque de lits (parce qu'on nous l'a dit: "le facteur limitant c'est le manque de lits") alors pourquoi on n’en crée pas ? Pourquoi on ne donne pas une marge de sécurité qui permettrait de créer ces lits ? De réouvrir des hôpitaux de proximité ? D'autres pays l'ont fait. Ce qui détendra en plus l'atmosphère de tout le monde et qui donnerait l'impression que l'hôpital va vous soigner et tient réellement. Là, je ne comprends pas bien, c'est la politique du pire et en même temps on ne fait rien en face. Pas de création de lits, pas de test pour aller dépister les lieux de vectorisation.» Virginie Le Guay: «Gérald, vous allez me dire si je ne me trompe: Mais non seulement on n'a pas créé de lits, mais on continue à en fermer depuis 1 an?» Gérald Kierzek: «Bien sûr.» Nicolas Domenach: «Mais il y a aussi un défaut dans la cuirasse, mais je crois que Gérald le connaît bien. C'est que l'on parle globalement. Moi hier soir, j'ai appelé des amis médecins, ils m'ont dit: « On n’a personne en réanimation ». À d'autres endroits il y a beaucoup. Ce que je veux dire c'est que dans des régions il ne se passe rien. Donc arrêtons de parler en globalité, il y a des régions où effectivement c'est inquiétant. Nice, par-exemple, je crois que c'est problématique. Si on pouvait essayer de penser différemment dès à présent, essayer de territorialiser en fonction des situations.»



À découvrir aussi...

Partager cette page