SOCIAL

Publié le 10 mars 2024

Liberté d'expression : un journaliste dévoile une liste de sujets refusés par Vincent Bolloré

Liberté d'expression et contrôle médiatique : Le cas CNews face au Conseil d'État

Le groupe Canal+, filiale de la multinationale Vivendi, qui est elle-même majoritairement possédée par le groupe Bolloré dirigé par le milliardaire Vincent Bolloré, se retrouve au cœur d'une controverse médiatique. CNews, la chaîne d'information appartenant au groupe Canal+, a suscité de vives discussions ces dernières semaines.

En effet, le 13 février, une décision du Conseil d'État a marqué un tournant : l'Arcom, le régulateur des médias, a été sommé de réexaminer sous six mois le respect par CNews de ses obligations en matière de pluralisme et d'indépendance de l'information. Cette démarche, qualifiée d'"historique" par Reporters sans frontières (RSF) à l'origine du recours, souligne une préoccupation croissante quant au rôle de CNews, perçue non plus comme un média d'information mais comme un média d'opinion, une accusation que la chaîne conteste.

La réaction des journalistes de CNews

Face à cette situation, les journalistes et chroniqueurs de CNews se sont vivement exprimés tout au long du mois de février, craignant une érosion de la liberté d'expression en France suite à la décision du Conseil d'État. Lors d'une audition en Commission à l'Assemblée nationale sur les autorisations de diffusion sur la TNT, des figures médiatiques telles que Pascal Praud, Laurence Ferrari, et Sonia Mabrouk sont intervenues pour défendre la ligne éditoriale de CNews, arguant que la chaîne respectait la pluralité des opinions et couvrait l'ensemble des sujets d'actualité.

Les révélations d'un ancien journaliste de Canal+

Le 7 mars, l'attention s'est portée sur le témoignage d'un ancien journaliste de Canal+, Jean-Baptiste Rivoire, lors de son audition devant la même commission. Jean-Baptiste Rivoire, qui a longtemps travaillé en tant que journaliste d'investigation pour Canal+, a apporté un éclairage sur les transformations survenues au sein de la chaîne avec l'arrivée de Vincent Bolloré à sa tête. Selon lui, cette arrivée a significativement modifié la liberté éditoriale, en témoigne le cas d'un documentaire sur les agissements de la banque Crédit Mutuel, déprogrammé suite à un mystérieux e-mail, sans explications formelles. Médiapart révélera plus tard que cette déprogrammation serait liée à une intervention du président du Crédit Mutuel de l'époque, Michel Lucas, auprès de son « ami » Vincent Bolloré.

Quelle liberté d'expression sous le contrôle de Bolloré ?

Jean-Baptiste Rivoire a aussi partagé qu'en octobre 2015, malgré une offre financière substantielle pour quitter la chaîne, il a choisi de rester pour continuer à exercer son métier de journaliste. Toutefois, la direction de Canal+ sous Vincent Bolloré a marqué un net refus de certains sujets d'investigation. Sur 11 propositions de documentaires, 7 ont été rejetées, incluant des sujets sensibles tels que le "dieselgate" de Volkswagen, les emplois fictifs dans la haute fonction publique, ou encore une enquête sur Nutella. Ces refus posent la question de la place réelle de la liberté d'expression au sein des médias contrôlés par le groupe Bolloré, notamment quand ces sujets d'investigation sont susceptibles d'affecter les intérêts commerciaux du groupe.

Le témoignage de Jean-Baptiste Rivoire met en lumière une problématique cruciale : peut-on réellement parler de liberté d'expression au sein des chaînes du groupe Bolloré, et en particulier CNews, quand l'arrivée de Vincent Bolloré aux commandes semble avoir restreint la portée des sujets abordables ? Cette situation soulève des interrogations sur l'indépendance des médias et le rôle des grandes corporations dans la définition des agendas médiatiques, mettant en jeu la pluralité des opinions et l'indépendance de l'information, piliers fondamentaux d'une société démocratique.



À découvrir aussi...

Partager cette page